Nous sommes très heureux de pouvoir vous proposer cette semaine le premier long-métrage de Tarik Saleh, dont vous pourrez découvrir l’étonnant parcours en cliquant ici, un authentique polar qui a emballé à juste titre la critique et remporté de très beaux prix aux festivals de Sundance et Beaune notamment.
En plus de la Bande-Annonce nous vous offrons de parcourir le très bel article de Samuel Douhaire paru dans Télérama qui vous permettra de vous faire une première idée sur ce superbe film que nous vous recommandons chaleureusement. Vous trouverez également un lien vous permettant de prendre connaissance du dossier de presse du film comportant quelques compléments d’informations.
"Le titre rappelle l'un des meilleurs romans noirs de James Ellroy, L.A. Confiden-tial. A raison : comme l'écrivain américain dans son évocation du Los Angeles des années 1950, le cinéaste Tarik Saleh offre une intrigue criminelle captivante de bout en bout, avec tous les ingrédients du genre — femme fatale incluse. Mais aussi le portrait, social et politique, d'une mégalopole à un moment clé de son histoire, avec ses puissants qui se croient au-dessus des lois et ses misérables utilisés pour les basses oeuvres... puis éliminés quand ils deviennent trop gênants.
Le scénario du film s'inspire de l'assassinat d'une célèbre chanteuse libanaise dans un palace de Dubai en juillet 2008. Un magnat de l'immobilier et membre du Parlement égyptien, proche de la famille de Hosni Moubarak, qui dirigeait alors le pays, avait été reconnu coupable d'avoir versé 2 millions de dollars à un haut gradé de la police cairote pour tuer son ancienne maîtresse. Les deux hommes ont été condamnés à respectivement quinze et vingt-cinq années de prison.
Le réalisateur, Suédois d'origine égyptienne, a transposé le fait divers en janvier 2011, alors que Le Caire est en pleine ébullition révolutionnaire — l'Egypte va bientôt connaître son printemps arabe. Le récit y gagne un surcroît de tension dramatique quand son héros, l'inspecteur Noureddine, voit son enquête parasitée puis menacée par les manifestations sur la place Tahrir — et leur répression de plus en plus violente. Ces rassemblements pour la démocratie visaient aussi à dénoncer les exactions et les magouilles des forces de l'ordre. Dans une mise en scène animée par un sentiment d'urgence, Tarik Saleh décrit ainsi une société et sa police gangrenées par la corruption. Le moindre flic de quartier touche son bakchich. Et quand un enquêteur veut arrêter un suspect en dehors de sa juridiction, il doit verser sa dîme au collègue qui règne sur le district concerné.
Au début du film, Nourredine est un policier comme les autres, pas plus — mais pas moins — « ripou » que ses pairs. Il est même promis à un brillant avenir s'il continue de servir le système en fermant les yeux — et en se servant au passage. Mais Nourredine est de la trempe d'un Philip Marlowe, le privé désabusé des livres de Raymond Chandler (Le Grand Sommeil, Adieu, ma jolie) : il y a une vraie intégrité morale derrière son cynisme. Un coup de foudre amoureux, mais aussi le sort atroce réservé à une immigrée soudanaise vont réveiller sa soif de justice. Son supérieur faussement paternaliste a beau le promouvoir commissaire pour calmer ses ardeurs, rien n'y fait : Nourredine veut s'attaquer aux maîtres du pays, quitte à risquer sa vie. Le personnage est magnifique et son interprète, Fares Fares, grand échalas au visage taillé à la serpe, étonnant... "
Samuel Douhaire
Télérama
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