Cette semaine du 11 au 17/10 marque la dernière ligne droite de notre grande excursion dans l’histoire du cinéma américain, manifestation proposée bien entendu pour notre plaisir de cinéphile mais aussi dans le cadre des Commémorations du Centenaire de l’Aérodrome américain d’Issoudun.
Pour finir en beauté nous vous proposons notamment une séance exceptionnelle du dernier film de Kathryn Bigelow : « Détroit » et nous tenons à remercier à cette occasion le distributeur du film : « Mars films » de ce joli cadeau. A noter que pour cette projection exceptionnelle les tarifs habituels restent en vigueur.
Les projections d’Easy Rider et Rivière sans retour sont également de la fête dans leurs versions restaurées mais attention, l’actualité cinématographique étant bouillonnante, cette semaine nous ne serons pas en mesure de proposer autant de séances que sur nos propositions précédentes
Détroit
Un film sous haute tension. Une reconstitution saisissante.
Kathryn Bigelow ne laisse personne indifférent. Avec Zero Dark Thirty, elle avait été accusée, pêle-mêle, d’apologie de la torture, d’antipatriotisme et de détournement de documents classés top secret. Voici qu’avec Detroit, elle se retrouve de nouveau sur la sellette.
Cette fois, elle se penche sur une série d’émeutes parmi les plus destructrices de l’histoire américaine. Elles se sont déroulées du 23 au 27 juillet 1967 à Détroit alors que la ville était pourtant montrée en exemple pour ses relations harmonieuses entre ses communautés blanche et noire.
Le tort de Bigelow cette fois-ci? L’agacement de certains de voir une réalisatrice blanche s’emparer de cette histoire. Mais, si son score au box-office s’en est ressenti, la découverte du film balaie cette polémique dès que la réalisatrice plonge dans l’action où elle maintient le spectateur en apnée pendant 2h20.
Quand la réalité dépasse la fiction
Ces scènes de présentation sont essentielles. Les personnages s’y multiplient sans qu’on sache qui on va suivre. La réalisatrice signifie ainsi qu’elle ne va pas raconter l’histoire d’un homme en particulier mais d’un événement vu à travers de nombreux regards. Puis, petit à petit, elle resserre son intrigue pour en installer la colonne vertébrale: un huis clos étouffant dans un hôtel aux clients majoritairement noirs, où les flics débarquent à la recherche d’un tireur. Des forces de l’ordre qui prêtes à tout pour trouver le coupable, en usant des méthodes les plus inhumaines.
La mise en scène montre de manière fascinante la tension, l’angoisse, la sensation que la moindre étincelle peut tout embraser. Certains pointeront un manichéisme facile. Les méchants Blancs contre les gentils Noirs pour résumer.
Mais, outre le fait qu’il existe des deux côtés des personnages plus nuancés, raconter Détroit passe par le respect historique de ce qui s’y est produit. Revient à montrer l’inhumanité, quitte à paraître en rajouter. À rester fidèle à la réalité précisément parce qu’elle dépasse la fiction. Et le coup de poing virtuose qu’elle assène tombe pile dans l’Amérique de Trump, où diviser pour mieux régner semble la norme. Rarement, le passé n’a eu autant la couleur du présent et du futur.
(Ré)écouter The Dramatics
Parmi les personnages de Detroit figure un des membres fondateurs du groupe de soul The Dramatics qui atteint les sommets des charts en 1971, avec l’album Watcha See Is Watcha Get. Il a été depuis allègrement samplé par Snoop Dog, le Wu Tang Clan et Public Enemy.
Thierry Chèze – L’express.fr
Attention, une séance unique vous sera proposée cette semaine pour découvrir le film : ce vendredi 13 octobre à 20h30 . Ce film ne faisant pas partie de notre volet patrimoine mais de l’actualité des sorties, il vous sera proposé aux tarifs habituels en vigueur le tarif unique pour tous à 3€ n’existera pas sur cette séance.
Easy Rider
Pour vous donner quelques éléments sur le film nous vous proposons ce très bel article publié sur le blog « l’œil sur l’écran » que vous pouvez retrouver à cette adresse : http://films.blog.lemonde.fr/
Avec l’argent d’un petit trafic, Wyatt et Billy partent faire une grande virée à moto à travers les Etats-Unis. Sans contrainte, libres comme l’air, ils partent sans but précis et vont faire des rencontres diverses… Easy Rider est souvent reconnu comme étant le premier road movie de l’histoire du cinéma (1). Il est assez amusant de regarder presque cinquante ans plus tard ce film emblématique qui a tant marqué les esprits au tournant des années soixante-dix. Le regard est obligatoirement différent. Easy Rider comporte indéniablement des longueurs (le séjour dans la communauté, le trip au LSD entre autres) mais la puissance évocatrice de certaines images paraît intacte. Voir Denis Hopper et Peter Fonda chevaucher leur chopper, cheveux au vent, sur fond de grands espaces désertiques et de la musique des Byrds, reste absolument magique. Le film met en avant, de façon un peu confuse, anticonformisme, drogue et surtout la notion d’une liberté, pas celle dont on parle mais celle que l’on vit. Les deux amis sont très différents : Billy (Denis Hopper) est un jouisseur qui ne se pose pas trop de questions alors Wyatt (Peter Fonda) intellectualise tout et cherche un idéal de vie. Le propos est toutefois finalement assez pessimiste, pas tant du fait de son dénouement fatal (et assez inoubliable), mais plutôt sur ce sentiment d’échec de Wyatt : « We blew it » (on a tout raté) dit-il à Billy sans plus d’explication. Réalisé avec un petit budget, le plus souvent en décors naturels, Easy Rider fut un succès planétaire, toute une génération se reconnaissant dans ces deux fugueurs en quête de liberté. La bande sonore (The Byrds, Steppenwolf, The Band, Jimi Hendrix, Roger McGuinn, Electric Prunes) n’y est également pas étranger. S’il a sans doute été surestimé sur un plan purement cinématographique, Easy Rider marque indéniablement un tournant : son succès inattendu a ouvert en grand les portes au cinéma américain indépendant avec, pour résultat, l’émergence d’un courant majeur des années soixante-dix : le Nouvel Hollywood.
Remarques :
* Caméo : au début du film, l’acheteur qui arrive en Rolls est interprété par Phil Spector en personne (sa seule apparition au cinéma).
* Physiquement, le personnage de Billy (Denis Hopper) est basé sur David Crosby (la ressemblance est vraiment frappante) et celui de Wyatt (Peter Fonda) sur Roger McGuinn (moins évident).
* C’est à Cannes que le film fut en premier remarqué : avant même la sortie américaine, Easy Rider reçut le prix de la première oeuvre (1969).
* Après le succès d’Easy Rider, Dennis Hopper tournera The Last Movie (1971) qui sera un échec. Il s’éloignera alors de la réalisation pour n’y revenir qu’une dizaine d’années plus tard.
* Easy Rider fut un tremplin pour la carrière de Jack Nicholson, sa vraie première occasion de révéler ses talents à un large public.
(1) Il faut toutefois nuancer cette affirmation : Pierrot le Fou de Jean-Luc Godard (1965) mériterait plutôt le titre de « premier road movie ». D’autres films encore avant lui s’en rapprochent (Les Fraises sauvages de Bergman en 1957 ou Le Fanfaron de Dino Risi en 1962, par exemple) mais leurs personnages n’ont pas cette volonté de quitter quelque chose qui caractérise les road movies.
Attention, une séance unique vous sera proposée cette semaine pour découvrir ou redécouvrir le film : le dimanche à 17h . Et pour n’avoir aucune excuse pour ne pas manquer ce beau moment de septième art nous vous proposons un tarif unique pour tous à 3€.
Rivière sans retour
Pour aborder cette dernière incursion dans le cinéma d’Otto Preminger nous vous proposons l’analyse d’Olivier Père, journaliste aux Inrockuptibles.
Ce splendide western contemplatif se double d’un bel itinéraire moral. Chef-d’œuvre et film de chevet.
Un fermier (Mitchum, à vos souhaits) débarque dans une région envahie par les prospecteurs d’or. Il y rejoint son fils après une longue séparation et doit conquérir l’estime puis l’amour de celui-ci. Dépouillés par un escroc et traqués par des Indiens belliqueux, le père et le fils, flanqués d’une chanteuse qui souhaite rompre avec son passé (Marilyn, dans un de ses meilleurs rôles), vont devoir s’enfuir en radeau sur un dangereux torrent surnommé « la Rivière sans retour ».
C’est le seul western d’Otto Preminger et son premier film en cinémascope couleur. L’étape du western est significative dans la carrière des grands cinéastes étrangers au genre, surtout s’ils sont européens. Dans L’Ange des maudits, Fritz Lang fidèle à son pessimisme tragique confine ses personnages dans un monde fermé (le saloon) qui renvoie aux thèmes de la vengeance et de la mort. Preminger signe au contraire avec Rivière sans retour une œuvre limpide à ciel ouvert et s’abandonne à la contemplation de la beauté majestueuse et sauvage de la nature, en osmose avec la sérénité et l’harmonie vers lesquelles se dirigent ses héros, puisque ce splendide film d’aventures est avant tout l’histoire d’un itinéraire moral, et d’une confiance retrouvée. Comme dans la plupart des chefs-d’œuvre de Preminger, il s’installe entre le spectateur et ce film hollywoodien une connivence presque clandestine que l’on aurait du mal à ressentir devant bien des essais psychologiques `ou intimistes. Le génial Preminger était détenteur d’un secret qui lui permettait de transformer une commande hollywoodienne en film personnel (pour lui) et en film de chevet (pour le cinéphile).
Olivier Père – Les inrockuptibles
Attention, deux séances seulement vous seront proposées cette semaine pour découvrir ou redécouvrir le film : le dimanche à 17h ainsi que le lundi à 14h30. Et pour n’avoir aucune excuse pour ne pas manquer ce beau moment de septième art nous vous proposons un tarif unique pour tous à 3€.